Question (Garçon / 2001)

Bonjour,
Je vous écris car je suis tombé sur un article de Swissinfo.ch qui me parait vraiment choquant dans les propos qu'il contient.
Le titre de cet article est "En Suisse, la démocratie est faite de droits et de devoirs".
Il s'agit d'une interview de la politologue Regula Stämpfli, elle y décrit le lien entre le droit de vote tardif des femmes en Suisse et le service militaire obligatoire pour les hommes.
Certains des arguments avancés sont complétement erronés.
Il y a une justification de l'obligation de servir pour les hommes (art.59 Cst.) qui repose sur des arguments hypocrites.

Ainsi, on peut y lire que :
" nous les femmes n’avons pas l’obligation de servir pour recevoir le droit de vote, mais nous remplissons déjà le devoir de maternité. Toute femme qui met un enfant au monde accomplit bien plus que l’homme qui fait son service militaire. "
Il y a une mise en parallèle, dans ce propos, de deux choses complétement différents car le service militaire est une obligation constitutionnelle et le fait d'avoir des enfants est un choix personnel. En aucun cas le droit suisse oblige les femmes à avoir des enfants. Cette vision fallacieuse de la société cache le poids que le service militaire fait peser sur les jeunes hommes suisses et fait passer le système actuel comme juste et équilibré quand bien même il ne l'est pas.

Plus grave encore, l'autrice se permet plus loin dans l'article de dire :
"L’obligation de servir l’Etat est aujourd’hui prise incroyablement à la légère, et ce ne sont plus que les démunis qui remplissent leurs devoirs face à l’Etat."
Il y a là un mépris de classe énorme, elle justifie une injustice sociale. Selon elle il est tout à fait normal que seul les personne démunis soit obligé de servir car elles n'ont pas les moyens de payer la taxe d'exemption.
Il y a aussi une confusion par rapport à la réalité de l'article 59 de la constitution car la loi ne peut pas être prise à la légère. De fait, les personnes astreintes au service n'ont d'autre choix que de sacrifier soit leur temps soit leur argent. En rappelant que la taxe militaire dure 11 ans avec un taux de 3 pourcents du revenu imposable.
Cela handicape réellement beaucoup de jeunes dans leur parcours de vie. Il est donc primordial que ce sujet ne soit pas pris à la légère.

Pour conclure, même si certaines discriminations de notre société sont plus acceptées socialement que d'autres, il est important d'en parler et de ne pas fournir des arguments fallacieux pour les justifier.
Ce texte est d'autant plus inacceptable qu'il s'agit du service public.

Heureusement les temps changent et certaines initiatives populaires osent aujourd'hui s'attaquer à ce système archaïque. L'initiative pour un service citoyen en est une preuve !

Désolé j'avais besoin de faire ce coup de gueule quelque part.
Merci pour votre patience.
Mes meilleures salutations.

Réponse

Lorsque Regula Stämpfli met au même plan devoir de maternité et service militaire, c'est qu'elle part du point de vue historique. Les femmes n'avaient pas les mêmes droits que les hommes parce qu'elles ne partaient pas à la guerre. Concrètement, n'étant pas mobilisables, les femmes n'avaient pas le droit de voter pour décider de la guerre ou de la paix. À nos yeux, ce que la politologue veut démontrer, c'est que les femmes accomplissaient, elles aussi, leur devoir par la maternité, mais que ce n'était pas reconnu.

De plus, même si le Droit suisse n'oblige pas les femmes à avoir d'enfants, le poids social est très grand. D'après nous, pour Regula Stämpfli la démocratie est faite de droits et de devoirs et que c'est dans ce cadre que chaque genre à des "obligations" différentes, qu'elles soient légales (faire son service militaire) ou sociétale (avoir des enfants). Actuellement, il est vrai que les femmes ont le droit de vote et que les hommes sont toujours soumis au service militaire. Par contre, les femmes vivent d'autres discriminations (salaire, etc.).

Concernant le paragraphe sur les plus démunis qui sont les seuls à remplir leur devoir, il nous semble que Regula Stämpfli donne davantage l'impression de le dénoncer que de le valider. Ce n'est pas du mépris de classe, car, selon nous, elle démontre justement que les plus privilégiés ne respectent plus ce devoir puisqu'ils peuvent se permettre de payer le montant dû. Mais reste que les personnes astreintes, et en cela, nous te rejoignons, doivent prendre du temps ou de l'argent pour répondre à cette obligation et que cela peut pénaliser certains jeunes selon leur parcours.

Finalement, il est tout à fait réel que des discriminations sont encore en cours dans notre société et qu'elles sont tolérées et même acceptées. Il faut en parler pour faire bouger les choses, comme tu le fais ici. Il est surtout important d'instaurer un débat respectueux, basé sur des faits objectifs et non des arguments fallacieux et c'est ce qu'a tenté de faire la politologue selon nous. Mais, de ça aussi, nous pouvons en débattre. ;)

Prends soin de toi,

Dernière modification le 17 janvier 2024

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