Question (Fille / 2004)

Comment savoir quand mettre fin à une psychothérapie ?

En posant cette question, je me rends bien compte à quel point je suis privilégiée d'avoir une thérapeute, alors que les recherches sont longues et souvent laborieuses pour trouver un spécialiste qui nous correspond, et que la thérapie a un coût.

Mais voilà, ça fait plus d'un mois que je m'interroge, car j'ai l'impression que plus rien de neuf ne sort de la thérapie et qu'au contraire elle prend de plus en plus une tournure qui ne me convient pas, voire qui m'enfonce. En effet, j'ai l'impression que ma thérapeute ne m'écoute plus et m'impose ses interprétations commes des vérités auxquelles je dois consentir, étant "aveuglée" sur ma vie puisque je n'ai pas assez de recul. Je me retrouve alors à acquiescer à des affirmations que je ne cautionne pas, créant un profond sentiment d'inconfort.

Peut-être ce sentiment découle de l'asymétrie inhérente à toute relation thérapeutique, où le psychologue comme spécialiste serait plus "lucide" sur les difficultés de son patient et joue un rôle de dévoilement de ce qui est caché ou incompris. Mais cette posture de "je sais mieux ce qui est bon pour vous" est très infantilisante et loin de m'aider sape ma confiance en mes propres capacités.

Je sais que l'idéal serait que je lui parle de mon ressenti, mais j'ai peur de ne pas trouver les mots justes (déjà que j'ai de la peine à la regarder en face quand je lui parle) et j'appréhende sa réaction (de l'incompréhension, de la colère, un reproche ?). D'un autre côté, je me demande si ce ressenti ne signifie pas qu'il est temps d'arrêter la psychothérapie: de toute façon elle doit bien se terminer un jour.

Mais, je me demande si je serais capable de me passer de ce soutien extérieur dans mon quotidien et particulièrement dans les moments difficiles...

Réponse

Nous comprenons ton dilemme actuel concernant ta thérapeute, ainsi que tes questionnements plus généraux autour de la thérapie. Il n’est pas toujours simple de savoir quand mettre fin à une psychothérapie, surtout lorsque le cadre ou les objectifs n’étaient pas clairement définis dès le départ, et lorsqu’il n’y a pas de temps de bilan réguliers pour faire le point sur ce qui a évolué ou non.

Tout d’abord, nous tenons à te dire que, dans une thérapie, il ne devrait pas y avoir de relation de pouvoir ni d’asymétrie figée. Le ou la psychologue est spécialiste de la psyché au sens théorique et clinique du terme, mais toi, tu es la véritable spécialiste de ton propre fonctionnement, de ton histoire et de ton vécu. C’est toi qui te connais le mieux, qui sais ce qui te parle, ce qui te touche, ce qui te met en difficulté et comment tu réagis à certaines situations. Ton ressenti a donc toute sa légitimité dans l’espace thérapeutique.

La ou le thérapeute est avant tout une personne en face de toi, formée à l’écoute active, qui a créé un espace sécurisé (son cabinet) dans lequel, pendant un certain temps, l’attention t’est entièrement dédiée. Par écoute active, nous entendons la capacité d’accueillir ce que tu exprimes, de relier tes paroles à ta vision du monde, à ton rythme et à ton vécu, sans chercher à t’imposer une vérité qui ne serait pas la tienne, ou pour laquelle tu ne serais pas encore prête. Une thérapie n’est pas un lieu où l’on dicte ce que tu dois penser ou ressentir, mais un espace où l’on t’aide à comprendre et à élaborer ce qui fait sens pour toi.

De plus, la ou le thérapeute ne devrait pas adopter une attitude qui ferait naître chez toi la peur de ne pas être comprise, la crainte de la mettre en colère ou l’angoisse d’un reproche. Ces peurs risqueraient au contraire de t’empêcher de t’ouvrir, de t’exprimer librement, d’écouter ce qui est proposé, ou même d’oser te montrer telle que tu es. Or, une relation thérapeutique se construit avant tout sur un climat de confiance et de sécurité émotionnelle.

C’est pourquoi nous pensons qu’il serait important de lui partager tes ressentis. Il est possible que vous soyez aujourd’hui dans une forme d’impasse relationnelle : tu n’oses plus lui parler de tout, ce qui t’empêche aussi d’entendre pleinement ce qu’elle a à te dire. De son côté, elle peut ressentir cette distance, cette retenue, et ajuster son comportement en fonction de ce qu’elle perçoit, ce qui peut renforcer le malaise de part et d’autre. Mettre des mots sur ce que tu vis pourrait permettre de clarifier cette dynamique et de voir s’il est possible de la faire évoluer ou, le cas échéant, de dire au revoir de manière plus consciente.

Cette discussion pourrait aussi te permettre de te rendre compte si la psychothérapie a encore du sens pour toi ou si elle a atteint son but. Vous pourriez alors faire un bilan de ce qui a été travaillé jusqu’à présent, ce qui t’aiderait à mieux comprendre où tu en es aujourd’hui et ce dont tu as encore besoin.

Enfin, même s’il peut être difficile de trouver un·e psychothérapeute, ce n’est pas impossible. Les délais d’attente peuvent parfois être longs, mais cette période pourrait aussi être l’occasion de réfléchir à ce que tu souhaiterais encore travailler en thérapie, ainsi qu’à l’approche thérapeutique utilisée jusqu’à présent. En effet, selon les objectifs que l’on a à un moment donné de sa vie, une approche qui convenait auparavant peut ne plus correspondre à ses besoins actuels.

Nous espérons avoir pu te donner quelques pistes de réflexion et nous restons à ton écoute.

Nous te souhaitons de belles fêtes de fin d'année et à bientôt,

L'équipe ontecoute.ch

Dernière modification le 22 décembre 2025

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